Gueye et CPE Maimonide Côte St-Luc, 2024 QCTAT 213
Date de décision: 19/01/2024
Mots-clés: Article 28 LATMP, Congédiement, Contestation, Décision défavorable à l'employeur, Décision favorable à la travailleuse, Éducatrice, Étirement lombaire, Grief, Intention des parties, Moyen préliminaire, Présomption de lésion professionnelle, Quittance, Renonciation, Transaction, UES 800
La travailleuse, une éducatrice en garderie, a déposé une réclamation dans laquelle elle allègue que son étirement lombaire s’est produit lorsqu’elle a fait une chute au sol parce qu’un enfant a retiré la chaise sur laquelle elle allait s’asseoir. La CNESST a refusé la réclamation. En début d’audience, l’employeur invoque à titre de moyen préliminaire l’existence d’une transaction entre les parties qui aurait mis fin au litige.
Il n’y a aucun désaccord entre les parties concernant l’existence de l’entente de règlement qui a mis fin au litige lié à un grief provenant du syndicat à la suite du congédiement de la travailleuse. Le désaccord concerne la portée de cette entente, et plus précisément la clause de quittance générale. Les parties ne s’entendent pas sur la question de savoir si la contestation de la travailleuse à l’égard de sa réclamation à la CNESST pour la reconnaissance d’une lésion professionnelle est visée par cette entente. L’employeur a produit des décisions selon lesquelles une transaction utilisant des termes simples et généraux est suffisante pour emporter la renonciation d’un travailleur à un droit qui lui est conféré par la LATMP. Il existe toutefois un second courant à l’effet contraire. Le présent tribunal privilégie ce courant et considère qu’une renonciation doit être suffisamment précise et claire pour avoir une telle portée.
En l’espèce, au moment de l’entente conclue entre les parties, la travailleuse avait déjà contesté la décision rendue à la suite d’une révision administrative auprès du Tribunal. Le greffe du Tribunal a transmis aux parties un avis d’acte introductif plus de 1 an avant la conclusion de l’entente entre les parties mettant fin au grief de la travailleuse. Cela est significatif puisque, à partir de ce moment, la contestation de la travailleuse était répertoriée avec le numéro de dossier du Tribunal propre au litige entre les parties. Si l’intention des parties était que l’entente signée entre elles pour régler le grief déposé par la travailleuse ait la portée que l’employeur lui prétend, on s’attendrait à ce que le litige devant le Tribunal soit expressément mentionné dans l’entente, ce qui n’est pas le cas. La travailleuse a présenté une réclamation à la CNESST et elle conteste la décision rendue, ainsi que son droit l’y autorise. En l’espèce, la travailleuse a affirmé que son représentant syndical lui avait dit que l’entente ne concernait pas sa présente contestation. La clause de quittance générale dans l’entente de règlement entre les parties ne met donc pas fin à la contestation de la travailleuse visant à faire reconnaître une lésion professionnelle.
Quant au fond, le diagnostic de la lésion, soit un étirement lombaire, est un diagnostic de blessure. De plus, le témoignage de la travailleuse a été corroboré en ce qui concerne la survenance de l’événement dans la salle où elle s’occupait des enfants. La présomption de lésion professionnelle trouve donc application; la travailleuse est présumée avoir subi une lésion professionnelle. Que ce soit l’absence non divulguée de la travailleuse ou son statut disciplinaire chez l’employeur, aucun de ces éléments n’est suffisant pour conclure qu’il y a absence de relation entre la blessure de la travailleuse et les circonstances de son apparition. L’employeur n’a pas été en mesure de repousser la présomption de lésion professionnelle. Par conséquent, la travailleuse a subi une lésion professionnelle.