Zabbah et Paccar du Canada ltée, 2025 QCCNESST 103

Date de décision: 25/02/2025

Mots-clés: Admissibilité de la preuve, Article 11 Loi sur la justice administrative, Article 2854 Code civil du Québec, Article 2855 Code civil du Québec, Article 2856 Code civil du Québec, Article 2865 Code civil du Québec, Article 2868 Code civil du Québec, Article 35 Charte québécoise, Article 35 Code civil du Québec, Article 36 Code civil du Québec, Article 5 Charte québécoise, Article 5 Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information, Article 6 Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information, Article 7 Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information, Assignation temporaire, Bridgestone, Congédiement illégal, Contusion coude, Décision favorable à la travailleuse, Déconsidération de l'administration de la justice, Entorse lombaire, Expéditrice, Filature vidéo, Plainte article 32 LATMP

Dans la cadre d’un audition sur une plainte déposée par la travailleuse en vertu de l’article 32 de la LATMP,  un moyen préliminaire est invoqué d’office concernant la recevabilité d’une preuve de filature et d’un enregistrement vidéo.

La travailleuse soutient avoir fait l’objet de mesures de représailles, notamment un congédiement, en raison de sa lésion professionnelle. Elle demande sa réintégration dans son poste ainsi que le versement du salaire et des avantages perdus depuis sa fin d’emploi. L’employeur souhaite déposer en preuve une vidéo et un rapport écrit résultant d’une filature. C’est la CNESST qui a invoqué d’office la question de la recevabilité de ces éléments de preuve.

Pour être recevable en preuve, la filature doit être justifiée par des motifs rationnels et être conduite par des moyens raisonnables. Avant d’employer cette méthode, un employeur doit avoir des motifs sérieux qui lui permettent de mettre en doute l’honnêteté du comportement de l’employé. En l’espèce, l’employeur désirait obtenir des informations quant à la capacité physique réelle de la plaignante et vérifier si celle-ci suivait des cours. La coordonnatrice en gestion d’invalidité de l’employeur a témoigné avoir pris en considération le fait que le médecin avait refusé les 2 assignations temporaires proposées par l’employeur. Elle soutient aussi avoir pris en compte le fait que, 3 semaines après l’événement accidentel, la plaignante exprimait beaucoup de douleur et que sa condition physique ne s’était pas améliorée. Selon elle, l’évolution de la condition de la plaignante était très atypique. Au lendemain de la seconde visite médicale, la coordonnatrice a discuté avec l’employeur et il a alors été décidé de demander une filature. La témoin a également expliqué que ses années d’expérience en gestion de dossiers d’invalidité lui permettaient d’effectuer une comparaison avec d’autres travailleurs ayant eu des lésions semblables.

En ce qui touche la question de savoir si la plaignante suivait des cours, la témoin a convenu qu’elle aurait pu vérifier directement cette information auprès de cette dernière. Or, la preuve a révélé que, lors de la première visite médicale, le médecin avait prévu un délai de 3 à 4 semaines avant la consolidation de la lésion et que l’employeur a demandé une filature 3 semaines après l’événement accidentel et au lendemain de la seconde visite médicale, au cours de laquelle le médecin avait prescrit des soins et des investigations.

Considérant ces éléments, l’employeur n’a pas démontré qu’il possédait des motifs fiables et rationnels suffisants pour douter de l’honnêteté de la plaignante. Conclure autrement équivaudrait à considérer que l’opinion médicale de l’employeur est plus fiable que celle résultant de la compétence d’un médecin ayant examiné la travailleuse. Par ailleurs, l’employeur n’a pas évalué la possibilité d’utiliser d’autres moyens moins intrusifs qu’une filature pour obtenir l’information recherchée. Or, si celui-ci désirait obtenir davantage d’informations quant à la condition physique de la plaignante, il aurait pu recourir, comme la loi le permet, au service d’un professionnel de la santé. Dans ce cas, la filature n’aurait pas été nécessaire. En outre, bien que le nombre de jours d’enquête soit raisonnable, l’enquêteur a effectué, à l’aide de sa caméra, un plan agrandi des fenêtres donnant sur la cuisine et la chambre de la plaignante, ce qui s’avère inutilement intrusif.

Compte tenu de ces circonstances, la filature ne constituait pas un moyen raisonnable pour obtenir l’information recherchée. Les éléments de preuve ont donc été obtenus dans un contexte où l’atteinte aux droits à la vie privée était injustifiée. La CNESST est d’avis que, bien qu’il soit important de connaître la vérité, l’utilisation de ces éléments de preuve déconsidérerait l’administration de la justice. En effet, aucune contradiction quant à des informations médicales présentes au dossier n’a été démontrée et l’employeur n’a même pas évalué la possibilité de recourir à d’autres moyens disponibles, telle une expertise médicale. La décision de recourir à la filature était prématurée et n’était pas suffisamment appuyée sur des éléments factuels objectifs et sérieux.

 La preuve résultant de la filature demandée par l’employeur est donc rejetée. 

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