M.N. et Compagnie A, 2016 QCTAT 5227
Date de décision: 01/09/2016
Mots-clés: Accident du travail, Agression physique, Agression sexuelle, Article 2 LATMP, Article 270 LATMP, Collègues, Condition personnelle préexistante, Décision favorable à la travailleuse, Enfance, Famille d'accueil, Harcèlement sexuel, Lésion professionnelle, Menuisière charpentière, Pénis, Plainte, Police, Sodomie, Trouble d’adaptation avec humeur anxio-dépressive
La travailleuse est menuisière charpentière. Elle se fait constamment harceler sexuellement au travail, notamment lorsque qu’un collègue de travail la saisie par-derrière en feignant de la sodomiser, se déshabille devant elle pour lui faire une danse lascive, lui montre des photos de son pénis, etc. Les autres travailleurs et supérieurs témoins ont ri devant ces situations. Un diagnostic dépression majeure est émis par le médecin traitant et la travailleuse réclame à la CNESST, qui refuse la réclamation.
Selon la preuve non contestée, la travailleuse a eu une enfance très difficile. Sa mère souffrant de schizophrénie, elle a été placée en famille d’accueil dès l’âge de six mois et elle y a vécu des abus sexuels en bas âge. Reprise par son père à l’âge de cinq ans, elle est devenue victime de la violence physique de ce dernier. Devenue adulte, elle décide de consulter une psychothérapeute dans un CLSC pendant quelques années afin de surmonter ses problèmes.
La preuve non contestée établit également que, le 27 avril 2012, la travailleuse subit une agression physique, de nature sexuelle, alors qu’elle travaille [à la Compagnie D]; alors qu’elle est penchée, un collègue de travail la saisit par derrière et mime un acte de sodomie. La travailleuse, bouleversée, en avise l’employeur; le travailleur fautif est congédié dès le lendemain. La travailleuse porte également plainte à la police, mais le nombre et la nature des questions que lui pose l’agent lui font comprendre que sa plainte n’ira nulle part. La travailleuse continue de travailler jusqu’à sa mise à pied en juillet 2012, sans consulter puisqu’elle n’a pas de symptômes; elle ne dépose donc pas de réclamation à la CSST.
Le Tribunal considère que la série de situations à connotation sexuelle vécues par la travailleuse à l’été 2014 équivaut à l’événement imprévu et soudain requis par la loi dans la définition d’un accident du travail. Le Tribunal explique également que: «Le fait qu’elle ait été fragilisée par la violence et des agressions sexuelles dans son enfance et au travail n’y change rien: une condition personnelle préexistante ne peut constituer un obstacle à l’admissibilité d’une lésion professionnelle».
La contestation de la travailleuse est accueillie.