Ville A et M.L., 2021 QCTAT 3437
Date de décision: 12/07/2021
Mots-clés: Article 270 LATMP, Article 271 LATMP, Article 352 LATMP, Décision favorable à la travailleuse, Dépression, Harcèlement psychologique, Harcèlement sexuel, Hors délai, Lésion psychologique, Motif raisonnable, Personnalité publique, Trouble de l'adaptation
Réclamation pour lésion psychologique (trouble d’adaptation et dépression) consécutif à du harcèlement psychologique et sexuel à l’endroit d’une travailleuse, acceptée par la CNESST.
L’employeur conteste et demande au Tribunal de déclarer que la réclamation est irrecevable puisqu’elle n’a pas été déposée dans le délai de six mois prévu par la Loi et parce que la travailleuse n’a pas démontré un motif raisonnable lui permettant d’être relevée de son défaut.
Le Tribunal rappelle que dans la recherche de l’existence d’un motif raisonnable pour excuser un retard, il faut considérer un ensemble de facteurs. Ceux-ci doivent être susceptibles d’indiquer à partir des faits, des démarches, des comportements, de la conjoncture et des circonstances, si une personne a un motif non farfelu, crédible et qui fait preuve de bon sens, de mesure et de réflexion. La diligence d’une partie est aussi à examiner et chaque cas doit être analysé à son mérite, en tenant compte des faits et des circonstances qui lui sont propres.
Les situations de harcèlement psychologique et sexuel alléguées par la travailleuse et leurs impacts sur sa capacité psychologique doivent être prises en compte par le Tribunal dans l’analyse de la recevabilité d’une réclamation pour une lésion psychologique et des motifs pour expliquer un retard.
Dans cette affaire, la travailleuse invoque que la situation était très difficile en raison du poste important qu’elle occupait depuis de nombreuses années et des relations étroites qu’elle devait maintenir avec son supérieur immédiat pour l’accomplissement de ses responsabilités, dans le contexte où malgré plusieurs demandes de cesser, celui-ci a persisté à agir de manière non désirée par la travailleuse.
Aussi, le supérieur immédiat de la travailleuse est une personnalité publique et la travailleuse craint de lui nuire et de nuire aux dossiers en cours.
Voyant que la travailleuse ne tolère plus ses agissements et qu’elle lui demande à nouveau de cesser, il va jusqu’à la congédier le 22 février 2018. La travailleuse avait donc raison de craindre les conséquences si elle faisait des vagues. Cette situation n’est donc pas un climat favorable à l’ouverture d’un dossier à la Commission impliquant cette même personne.
Le 21 septembre 2018, elle est tellement perturbée par tous les événements et par cette situation incluant la perte de son emploi et les négociations en cours pour tenter de trouver une solution à l’amiable, que la travailleuse s’en remet totalement à sa procureure pour prendre action. C’est là qu’on lui recommande d’ouvrir un dossier à la Commission. Sans cette aide, elle ne l’aurait pas fait.
La contestation de l’employeur est rejetée.