Générale électrique du Canada (Bromont) et Mitchell, 2025 QCTAT 807
Date de décision: 21/02/2025
Mots-clés: Article 29 LATMP, Décision favorable au travailleur, Épicondylite externe, Interprétation large et libérale, Loi remédiatrice, Mouvements répétés, Opérateur, Présomption de l'article 29, Tendinite du long extenseur du poignet, Vocation sociale
Le travailleur, un opérateur, a produit une réclamation pour un diagnostic de tendinite du long extenseur du poignet droit qu’il attribuait au mouvement consistant à abaisser un levier pour poinçonner une pièce de métal à plusieurs reprises. La CNESST a accepté sa réclamation.
Le travailleur soutient que l’apparition graduelle d’une douleur à son coude et à son avant-bras a commencé après son affectation à un nouveau poste. Même si une telle situation peut être assimilée à un accident du travail dans son sens élargi, en l’espèce, elle s’apparente beaucoup plus à une maladie professionnelle.
Le premier critère d’application de la présomption de maladie professionnelle prévue à l’article 29 de la LATMP est rempli. Le diagnostic de la lésion est celui de «tendinite», conformément à ce que prévoyait l’annexe 1 de la loi au moment des faits en litige. Quant au second critère, soit que le travail doit impliquer des mouvements effectués au cours de périodes de temps prolongées, il est également rempli. Une analyse de la jurisprudence permet de constater que 2 courants d’interprétation existent présentement à cet égard. Le Tribunal privilégie l’interprétation libérale, plus large, plutôt que celle qui prévoit une interprétation restrictive de l’annexe. Il n’est donc pas indiqué d’exiger du travailleur, au stade de l’application de la présomption de maladie professionnelle, qu’il administre une preuve relative à la cadence de son travail ou à ses périodes de repos ou toute autre preuve biomécanique de cette nature.
En l’espèce, une partie importante du travail consiste à prendre des petites bandes de métal et à y faire une série de 10 trous à l’aide d’une presse manuelle. Le Tribunal considère que le nombre de pièces que le travailleur assemblait dans une journée de travail normale pendant la période de développement de la lésion était d’environ 40. Cela signifie que le travailleur a effectué le même mouvement de 1 600 à 2 000 fois par semaine, et ce, pendant plus de 2 mois.
Le diagnostic d’épicondylite a fait l’objet d’une certaine controverse jurisprudentielle quant à savoir s’il permet l’application de la présomption de maladie professionnelle. Le Tribunal considère que le second courant, qui inclut l’épicondylite dans la notion de «tendinite» prévue à l’annexe, est plus approprié.
La preuve produite par l’employeur ne suffit pas à repousser la présomption pour le diagnostic d’épicondylite. Le mouvement d’activation de la presse, comme cela a été démontré par le travailleur, place son poignet en extension presque complète. Il requiert une préhension de la main avec force pour garder la prise sur le levier. Dans cette position, le travailleur doit fréquemment appliquer des forces de près de 70 livres et, lorsque la presse termine son mouvement, l’arrêt est brusque et un choc se fait ressentir dans le bras. Par ailleurs, les douleurs que celui-ci a ressenties en février 2021 sont apparues alors qu’il effectuait cette tâche et elles étaient particulièrement incommodantes lorsqu’il activait la presse. Par conséquent, le travailleur a subi une lésion professionnelle, soit une tendinite du long extenseur du poignet doit et une épicondylite externe droite.