Dostaler c. Teamsters Québec, local 1999, 2024 QCTAT 3164
Date de décision: 30/08/2024
Mots-clés: Article 47.2 Code du travail, Atteinte vie privée, Congédiement, Décision défavorable au syndicat, Décision favorable au travailleur, Droits fondamentaux, Logiciel de géolocalisation, Loi sur la santé et sécurité du travail, Période probatoire, Teamsters
Dans ce dossier, le travailleur reproche à son syndicat d’avoir manqué à son devoir de juste représentation à l’occasion des rencontres ayant mené à son congédiement durant sa période probatoire et en refusant de contester, par grief, la demande de l’employeur visant à le contraindre à installer sur son téléphone personnel un logiciel de géolocalisation pour être en mesure de vérifier ses déplacements dans le cadre de son travail. Il dépose une plainte en vertu de l’article 47,2 du Code du travail.
La preuve révèle que, lors de la rencontre disciplinaire, 2 importants reproches adressés au travailleur concernaient l’exercice de ses droits, soit de s’être informé de ceux-ci auprès de la CNESST et d’avoir posé des questions relatives à la légalité de la nouvelle obligation d’installer le logiciel.
Pour le Tribunal, ces reproches peuvent donner ouverture à certains recours prévus dans des lois d’ordre public, notamment la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Or, aucune enquête n’a été faite par le syndicat, ce dernier n’a pas déployé de grands efforts, même si l’affaire concernait des droits fondamentaux, notamment le droit à la vie privée des personnes salariées. Aucune question n’a été soulevée à l’égard du congédiement, bien qu’il soit survenu de façon concomitante de ces événements.
En ce qui concerne l’exercice de droits d’ordre public relatifs à la santé et la sécurité du travail, c’est-à-dire la démarche effectuée auprès de la CNESST et qui constitue l’un des motifs de la sanction, non seulement il n’a entraîné aucune réaction syndicale, mais cet aspect, présentant une possible illégalité, n’a même pas été examiné par le syndicat. Ce dernier s’est contenté de la version de l’employeur, adhérant à son interprétation sans autre vérification. Bien que le travailleur était un employé temporaire, dont le statut était précaire, et qu’il ne bénéficiait pas de la protection d’emploi en vertu de sa convention collective, il demeure que c’était la question de l’intrusion dans sa vie privée qui le préoccupait et celle-ci a notamment été à l’origine des mesures disciplinaires imposées contre lui, dont le congédiement.
Le Tribunal rappelle que le devoir syndical de représentation implique une analyse de la situation ainsi qu’une évaluation des droits au moyen d’une enquête sérieuse, le rôle premier et fondamental du syndicat est de s’assurer que les décisions concernant les personnes salariées qu’il représente sont conformes à la loi.
Le statut du plaignant, qui le prive du droit au grief en vertu de sa convention collective, ne peut justifier l’inaction syndicale. Considérant les différents droits en jeu et l’absence d’assistance fournie au plaignant, le traitement superficiel accordé à la situation de celui-ci ne peut être écarté.
Le syndicat a manqué à son devoir de représentation et le travailleur est donc autorisé à soumettre sa réclamation à un arbitre. Considérant les circonstances, il est également autorisé à retenir les services de la personne de son choix, et ce, aux frais du syndicat.